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Formation des enseignants pour une école inclusive : miser sur le partenariat

L’insuffisance de la formation des enseignants paraît être l’un des principaux écueils de l’inclusion scolaire. Ne serait-il pas opportun de mieux reconnaître et valoriser l’apport du partenariat dans cette formation ?

Car assurément il y a un problème de la formation des enseignants. Le Ministère lui-même en convient. Ne vient-il pas de reconnaître que si la grande majorité des enseignants accueillent sans hésitation des élèves en situation de handicap, la plupart « se montrent insatisfaits des opportunités de formation qui leur sont données » (1).

Une question sur la formation des enseignants

En conséquence le Ministère se propose donc « d’accroitre l’offre de formation ». Mais le problème est-il d’ordre quantitatif ? Suffirait-il d’en rajouter, en augmentant par exemple le nombre des formateurs, alors que ces offres sont déjà nombreuses ? Ne faut-il pas s’interroger d’abord sur la nature de la formation, se demander comment l’améliorer et comment la rendre plus efficace ?

Un certain nombre d’instances officielles, d’organismes nationaux et d’experts, qui ont pour objet la promotion d’une école inclusive, ont évoqué récemment cette question. On retrouve à la lecture de leurs déclarations (2), de leurs réflexions et préconisations (3) ou de leurs rapports (4), des recommandations communes.

Nous retiendrons dans cet article celle qui nous paraît aujourd’hui la plus prometteuse : tous pensent qu’il faut miser sur le partenariat.

Le partenariat avec les professionnels 

Le Ministre souhaite que l’offre médico-sociale soit « adossée » à l’école. Cela indique une volonté de rapprochement entre enseignants et professionnels pour travailler ensemble.

Le CNCPH demande que les interventions médico-sociales, institutionnelles (SESSAD) ou libérales (orthophonistes…) puissent avoir lieu plus systématiquement dans l’école, notamment pour favoriser les rencontres enseignants/professionnels.

L’intervention des professionnels n’est pas seulement une aide apportée à l’enfant mais elle peut être aussi une source de formation pour l’enseignant. L’enseignant apprend quelque chose auprès de l’intervenant, son regard sur l’élève s’en trouve modifié.

Le partenariat avec les parents

Le partenariat, c’est également avec les parents. Le CNCPH pense qu’il faut leur donner davantage la parole et voudrait faire du partenariat avec les familles une priorité. Dans cette optique, il fait référence aux  préconisations du rapport 2016 du Médiateur de l’éducation nationale (5).

Entendre le mot « formation » au sens large

Le mot formation nous induit certainement en erreur. Formation évoque d’emblée une transmission des connaissances du formateur vers celui qui sera formé. Un mouvement vertical, du haut vers le bas. Mais en l’occurrence, ce n’est pas du tout de cela qu’il s’agit.

Quel est le principal grief des parents vis-à-vis des enseignants ? Il est de ne pas mettre en œuvre le PPS et de ne pas pratiquer les aménagements pédagogiques. « Les adaptations sont au bon vouloir des enseignants et professeurs qui ne sont pas ou peu formés. Certains profs sont réfractaires aux adaptations (pour les élèves handicapés) », lit-on dans le rapport « Plus simple la vie » (4).

Or c’est l’enseignant qui a l’élève dans sa classe, c’est lui qui se heurte aux difficultés de la mise en œuvre du PPS, comme le rappelle assez justement le Médiateur de l’Education nationale (5). C’est de là qu’il faut partir.

La concertation nécessaire

Il s’agit donc de regarder ensemble – enseignants, professionnels et parents – quelles sont les difficultés et les capacités de l’enfant, pourquoi certaines adaptations sont nécessaires, comment les mettre en place, et comment l’enfant réagit à ces adaptations.

Or, les enseignants n’y sont pas habitués. L’un des problèmes des enseignants est qu’ils travaillent trop : ils travaillent trop pour préparer leur leçon et ensuite, en classe, leur souci est de bien faire leur leçon. Il reste peu de temps pour observer comment chaque élève l’a reçue. On peut mener des évaluations collectives au regard de la norme de la classe. Mais évaluer la progression d’un élève par rapport à lui-même, quand cet élève échappe à la norme, demande une autre approche.

Alors il faut travailler ensemble. Il faut observer et il faut parler les uns avec les autres. A la base du partenariat, il y a la concertation. Il ne s’agit pas de faire venir de l’extérieur des « formateurs » qui ne connaissent pas l’élève, sauf sans doute en tant qu’animateurs de la concertation.

Formation et motivation

Ajoutons que sous le nom de manque de formation ou de compétence, on met souvent manque de disponibilité, désintérêt, mauvaise volonté, manque de motivation. Il y a des enseignants qui n’y croient pas : « quoi qu’on fasse, cet élève ne progressera pas« . Mais justement, il ne faut pas laisser l’enseignant seul vis-à-vis de l’élève. Le partenariat peut être source de motivation.

Des problèmes de formation continue

La concertation demande du temps et de la disponibilité, qu’on le veuille ou non. Et peut-être une méthodologie un peu différente. Rencontrer les professionnels et les parents ? Encore faudrait-il dire où, quand et comment. Il y a déjà quelques jalons en ce sens, principalement avec les Equipes de Suivi de la Scolarisation (ESS), mais très insuffisants.

Le problème des enseignants est qu’ils ont une classe et des horaires de travail. Les libérer pendant leur temps de travail ou leur accorder des compensations horaires pour des réunions tenues en dehors de ce temps demande que l’administration dispose d’un nombre suffisant de remplaçants. Des remplaçants au service de la formation continue, si l’on veut bien considérer que les concertations sont des temps de formation continue.

Le CNCPH observe aussi qu’il serait nécessaire de prévoir les temps de rencontre des parents avec les enseignants. Evidemment !

Du côté des professionnels, la question ne se pose pas pour ceux qui appartiennent au secteur médico-éducatif, par exemple des personnels des SESSAD. La concertation fait partie de leurs habitudes de travail et les temps nécessaires sont prévus dans leurs horaires. La situation est moins favorable pour les professionnels libéraux. Quand ils y participent, la concertation est une forme de bénévolat, ce qui explique qu’elle reste souvent plus ou moins aléatoire.

Du côté des parents, la situation est plus complexe, car à côté des rencontres ordinaires parents-enseignants, il faudrait parler des relations avec les associations. C’est une autre question.

Bref, il y aurait quelques décisions à prendre, qui ne nécessitent pas un symposium international des spécialistes du handicap.


Références

  1. Communication ministérielle du 8 octobre 2018
  2. Permettre à l’École de la République d’être pleinement inclusive – Communiqué de presse du Ministre – 4 décembre 2017
  3. Ecole inclusive : état des lieux, réflexions et recommandations du CNCPH (Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées) (p 11-15). – 13 avril 2018
  4. Plus simple la vie : 113 propositions pour améliorer le quotidien des personnes en situation de handicap – (p 161). Mai 2018.
  5. L rapport du Médiateur de l’Education nationale – année 2016 – Première partie : la scolarisation des élèves en situation de handicap (p 45-48) – publié le 6 juin 2017

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